Critique de Le Roi Arthur : La Légende d’Excalibur, Guy Ritchie à Camelot

S’il est bien un mythe adapté et réadapté à travers les âges, c’est bien les légendes Arthuriennes. De ces nombreux récits écrits aux alentours du XIIème siècle par des moines et d’autres auteurs comme Chrétien de Troyes, on a fait des séries TV (Kaamelott ou Merlin), des jeux-vidéos (Dark Age of Camelot), des dessins-animés (Merlin l’enchanteur) et bien évidement des films, et c’est de l’un de ceux là qu’il va être question aujourd’hui, et cette fois-ci c’est Guy Ritchie, qui a déjà brillamment revisité Sherlock Holmes et Des Agents très Spéciaux, qui s’y colle !

Alors que Le Roi Arthur est en train de connaitre un échec commercial cuisant, tuant ainsi dans l’œuf la série de films qui était sensée suivre, nous nous penchons tout de même sur ce film d’un réalisateur qu’on apprécie beaucoup et qui explore un genre sous exploité au cinéma : l’heroïc fantasy !

Jeune homme futé, Arthur tient les faubourgs de Londonium avec sa bande, sans soupçonner le destin qui l’attend – jusqu’au jour où il s’empare de l’épée Excalibur et se saisit, dans le même temps, de son avenir. Mis au défi par le pouvoir du glaive, Arthur est aussitôt contraint de faire des choix difficiles. Rejoignant la Résistance et une mystérieuse jeune femme du nom de Guenièvre, il doit apprendre à maîtriser l’épée, à surmonter ses démons intérieurs et à unir le peuple pour vaincre le tyran Vortigern, qui a dérobé sa couronne et assassiné ses parents – et, enfin, accéder au trône

La Légende, encore la Légende, toujours la Légende

Le Roi Arthur n’a clairement pas comme ambition de se démarquer avec son scénario. C‘est d’ailleurs son principal défaut. La structure du film est tout ce qu’il y a de plus convenue : le héros est un roublard erratique et irresponsable, mais quand un danger que lui seul peut contrer se présente, il doit se reprendre en mains et embrasser sa destinée afin de devenir le sauveur qu’il a, au fond, toujours été. C’est une structure vue, revue, et re-revue un nombre incalculable de fois (pas plus tard que dans Rogue One en décembre dernier). Le problème c’est que Le Roi Arthur n’apporte pas beaucoup plus de subtilités. Les méchants sont très méchants, et à aucun moment leur amoralité n’est questionnée, et les gentils sont certes un peu méchants mais ont quand même un bon fond et s’élève au dessus de la masse des vilains par leurs valeurs fortes et leur courage. L’intrigue est donc incroyablement prévisible et véritablement sans surprise. Les ficelles qui font avancer l’histoire sont très visibles et aucun retournement de situation ne vous clouera à votre siège.

Si le scénario est assez pauvrement écrit les dialogues, par contre, sont de qualité. Toutes les répliques font mouche et certaines sont délicieusement décalées. Qui plus est les acteurs sont très bons : Charlie Hunman s’amuse réellement avec son personnage de gangster médiéval à la langue bien pendue (qu’on croirait tout droit sorti de Snatch, LE chef d’œuvre de Guy Ritchie) et Jude Law incarne un excellent antagoniste : glaçant, d’une grande classe mais avec une dimension tragique… Un mage noir dans toute sa splendeur ! Quant à la galerie de personnages secondaire, ils sont sympathiques mais il apparaît clairement qu’ils devaient être développés dans des prochains films. Mention spéciale à Astrid Bergès-Frisbey (dont la véritable identité du personnage n’est étrangement révélée que sur la page Allociné du film) qui campe une mystérieuse magicienne et qui est tout à fait envoûtante.

Une course effrénée vers le trône

Le Roi Arthur ne mise clairement pas sur son scénario, et sacrifie l’originalité pour l’efficacité. Ce qui rend ce film plaisant et inventif ce sont définitivement ses visuels. On est incontestablement, et pour notre plus grand plaisir, face à du pur Guy Ritchie ! Accélérés, ralentis, montages en rythme, travelings délirants, caméra embarquée sont de la partie pour une réalisation survoltée qui se renouvelle sans cesse. Certaines séquences tiennent du génie comme le passage résumant en quelques minutes l’enfance et la jeunesse d’Arthur en introduisant très intelligemment tous les motifs du personnage.

En effet le principal atout du film, c’est son rythme. Il vous agrippe par le col dès les premières minutes, se met à courir à toute vitesse et ne vous lâche qu’au moment du générique de fin. Ce rythme, le film l’obtient grâce à l’intrigue épurée, au montage d’un dynamisme démentiel et à la musique remarquable. Que ce soit pour insuffler un souffle épique dans les scènes d’action, pour appuyer la dimensions dramatique d’une scène de doute ou pour accompagner les délires de la narration, la bande-originale remplit particulièrement bien son rôle et je tiens à attirer votre attention sur  la chanson « The Devil and the Huntsman » qui est absolument géniale.

Il faut le voir pour le croire

La mise en scène est élégante et la lumière, dans des teintes de blanc de noir et de gris, traduit parfaitement de la noirceur et de la misère de ce monde de fantasy. Qui plus est la direction artistique de ce film est bonne et les décors sont beaux (c’est très intelligent de la part du film d’intégrer dans l’architecture médiévale de Londinim des éléments rappelant la Rome Antique). Armure plutôt excentriques, éléphants d’une taille démesurée ou « sirènes » tentaculaire à la fois sexy et cauchemardesque… On nage en plein dans la fantasy assumée et décomplexée et c’est plaisant.

« Décomplexée » définit aussi assez bien les scènes d’action, se basant largement sur les incroyables pouvoirs d’Excalibur. Attendez-vous des affrontements en plan séquence époustouflants avec une caméra ultra-mobile et un déferlement d’effets spéciaux. L’esthétique a tendance à se rapprocher du jeu-vidéo, ce qui pourra gêner certains, d’autant plus que l’équipe chargée des effets spéciaux semble quelque peu débordée et que certains effets s’en retrouvent quelque peu enlaidis. Mais si on n’est pas trop tatillon ou qu’on sait se laisser divertir par une scène d’action originale et impressionnante, alors on n’en sera pas gêné le moins du monde. J’attire tout particulièrement votre attention sur la scène d’ouverture, dantesque, qui n’a rien à envier au meilleur des Seigneur des Anneaux (c’est-à-dire le 3, évidement !)

Le Roi Arthur de Guy Ritchie est donc un excellent divertissement, qui n’a d’ailleurs pas vraiment d’autres ambitions. Il manie parfaitement les codes de l’heroïc fantasy tout en y intégrant des éléments incontournables de la mythologie Arthurienne. Mais clairement, il faut le voir pour le croire car c’est par ses visuels, sa réalisation et son montage que Le Roi Arthur vous décrochera la mâchoire. On ne peut que regretter l’échec relatif du film au box-office qui enterre le projet de saga tant les éléments installés dans ce premier volet promettaient une série grandiose. Réjouissons-nous tout de même que son statut de premier volet n’ait pas pourri le film en n’en faisant qu’une introduction à peine voilée. C’est déjà un mal d’évité.

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