Succès venu de l’autre côté des Pyrénées, le film Verónica est arrivé mercredi dernier en France. Réalisé par Paco Plaza célèbre pour sa saga en found-footage horrifique REC dont il était également le scénariste. Cette dernière est aujourd’hui considérée comme incontournable bien qu’inégale, grâce à l’originalité de l’angle adopté et de la réalisation.
Après les zombies, c’est au thème maintes fois exploité de la possession que l’auteur espagnol s’intéresse. La question était donc de savoir si cette nouvelle œuvre ferait figure de curiosité géniale ou serait une énième production horrifique convenue.
À Madrid, après avoir participé à une séance de spiritisme avec ses amies, une jeune fille est assaillie par des créatures surnaturelles qui menacent de s’en prendre à sa famille.
Le seul cas d’activité paranormale officiellement reconnu par la police espagnole.
Faire du neuf avec du vieux
Que les fans du genre à la recherche désespérée de nouveauté et ceux de Plaza se rassurent tout de suite : Verónica s’intègre parfaitement à cette nouvelle vague du genre qui est en train d’émerger. Ce mouvement très récent et encore peu développé cherche à briser une décennie entière (voire plus) de productions à la chaîne et indiscernables les unes des autres car identiques. Identiques dans leur réalisation, dans leurs cadres où le fantastique surgit, dans son traitement même, les personnages, les actes, etc… En bref, tout ce qui touche au film en général.
Quand les productions américaines cherchent à renouveler les gimmicks du genre, les productions européennes semblent vouloir prendre un tournant plus profond, en remettant l’inexplicable au sein d’une réalité des plus banales, soit en revenant à qui fait la racine du fantastique. Deux démarches intéressantes mais assez différentes.
L’exemple récent qui vient à l’esprit est évidemment Grave (2017). Si les deux films traitent l’étrange de façon radicalement différente et que Verónica ne parvient pas à concurrencer le long-métrage génial de Julia Ducournau, c’est la démarche qui est à mettre en parallèle. Une horreur plus proche de la réalité, plus sensible créant une atmosphère particulière sans coller forcément l’étiquette « fantastique » à chaque scène. Aussi, quand l’incompréhension et l’horreur émergent, elles semblent plus palpables.
En effet, le point fort et de loin reste la réalisation avec une véritable mise en scène imprégnée de symbolisme, prenant soin de ses transitions. L’horreur est psychédélique, osée et fait perdre ses repères aux spectateurs les plus aguerris. Une originalité dont on avait presque oublié l’existence dans ce type d’œuvre à cause des « créations » soporifiques évoquées précédemment. S’agissant de la mise en scène en particulier, celle-ci joue merveilleusement bien de l’environnement sans le trait parfois caricatural qu’il est facile de critiquer. Les amorces sont correctement mises en place sans insister ridiculement dessus. En résumé, c’est une véritable esthétisation de l’image qui est recherchée avec des cadres et des situations qui se répondent en écho tout le long du film. Une démarche proche des films de genre des années 1970 qui connaît un nouveau souffle grâce aux codes de cinéma et problématiques plus actuelles.
Personne n’est parfait
Tout ce travail serait pourtant bien moins méritant sans un autre aspect du film lui aussi surprenant : la musique.
Oubliez les violons inquiétants et les sons mécaniques, c’est une bande-son lourde et techno qui rythme la descente aux enfers de l’adolescente. Un choix risqué, bien plus évident pour de la science-fiction au premier abord. Mais un choix assumé et surtout réussi, qui mêlé aux parties pris visuels confère au film cette ambiance singulière qui fait sa réussite.
Toutefois, si le film s’en sort honorablement, il n’est pas exempt de défaut. Et entre-autre, celui tristement répandu dans les productions horrifiques, des dialogues. Convenus et descriptifs, ils sont pour la plupart du temps faibles, voire inutiles à l’intrigue. Dommage, de la part d’un film ayant pris des risques et avec une telle créativité, de faiblir sur un point si commun. Heureusement, ce n’est pas au centre des attentes du public qui va voir ce type de long-métrage et puisqu’il s’agit d’une faiblesse commune, il reste possible d’en faire relativement abstraction.
Autrement, le jeu d’acteur est assez inégal, en tout cas s’agissant des personnages secondaires. Certaines scènes sont troublées par ce problème qui se rajoute à celui des dialogues, faisant vaciller l’ambiance installée. C’est le cas notamment de la fameuse scène de Ouija où les actrices alternent entre sur et sous-jeu, réduisant la tension apportée par les visuels. Une critique qui peut être modérée par le jeu très correct de l’actrice Sandra Escacena dans le rôle-titre, qui débute sa carrière.
Vent de fraîcheur dans le monde des productions trop calibrées de l’épouvante, Verónica réussit son pari de mêler hommage aux classiques du genre et renouveau au dosage homogène. Rencontrant quelques défauts d’écriture et de jeu, il reste un très bon film d’épouvante qui assoie un peu plus la positions de Paco Plaza dans le cinéma espagnol. A voir pour sa prise de risque donc, mais aussi car c’est tout simplement un bon film d’épouvante.