Tout droit sorti des esprits déjantés de William Hanna et Joseph Barbera, Tom et Jerry est un pur produit des années 40. Reposant sur un concept tout simple, à savoir un chat chassant une souris, le cartoon du duo américain est devenu culte au fil des années, passant entre les mains de dessinateurs passionnés avec à chaque fois plus ou moins de réussite (l’ère Gene Deitch ou le traumatisme d’une génération).
Sujet à de nombreuses adaptations, le duo revient pour la seconde fois sur grand écran, dirigé cette fois-ci par Tim Story (Les Quatre Fantastiques). Optant pour un mélange d’animation et de prises de vues réelles, que vaut vraiment le grand retour de Tom et Jerry au cinéma ?
Lorsque Jerry s’installe dans le plus bel hôtel de New York la veille du mariage du siècle, Kayla, la wedding planneuse, n’a d’autre choix que d’embaucher Tom pour se débarrasser de l’intrus. Mais la course-poursuite qui s’engage entre le chat et la souris risque de réduire à néant la carrière de la jeune femme, gâcher la fête et détruire l’hôtel ! Pourtant, quand un employé dévoré d’ambition commence à s’en prendre à Tom, Jerry et la wedding planneuse, c’est un bien plus grand danger qui les menace…
Comme chien et chat
Le duo formé par Tom et Jerry a déjà eu l’occasion de débarquer sur grand écran, avec un premier long-métrage sobrement intitulé Tom et Jerry, le film sorti en 1992. Près de trente ans plus tard, Warner décide de réitérer l’expérience, mais en choisissant une approche bien différente du premier film. Là où le long-métrage de 1992 était entièrement animé, ce Tom et Jerry nouvelle version mêle animation et prises de vues réelles, un procédé qui a trouvé son apogée entre les mains de Robert Zemeckis avec Qui veut la peau de Roger Rabbit.
Cependant, si la sortie des premiers visuels était bien loin de nous rassurer, le constat post-visionnage n’en est que plus accablant : l’animation de Tom et Jerry est à des années lumières de celle utilisée il y a trente ans. Malgré une certaine envie de surprendre son spectateur, l’illusion d’un monde abritant protagonistes animés et personnages bien réels est instantanément brisée. Le film de Tim Story ne réussit jamais à intégrer l’animé et le réel sur le même plan, rendant ainsi complètement ridicule toute interaction entre humains et animaux. Ce souci d’intégration de l’image détruit peu à peu la crédibilité du film, jusqu’à affecter directement le jeu d’un casting tout autant peu inspiré. Bien que la présence de Chloë Grace Moretz et Michael Peña soit toujours appréciable, la piètre qualité de l’animation rend risible chacun de leurs échanges, tant l’on a constamment l’impression de les voir donner la réplique aux murs de l’hôtel.
Attention, film errant
Si l’animation de Tom et Jerry ne rend clairement pas hommage à son matériau d’origine, il est d’autant plus regrettable que le film ne semble pas plus inspiré sur le plan de la mise en scène. Bien que reprenant avec plus ou moins de réussite l’humour slapstick qui fit le succès des courts-métrages animés de Hanna et Barbera, le long-métrage ne dispose d’aucune idée originale, se reposant sur une série d’affrontements et de courses-poursuites sans la moindre fulgurance visuelle. Pour ne pas arranger les choses, le film commet l’erreur de délaisser ses personnages animés pour se concentrer sur ses protagonistes humains empêtrés dans l’organisation d’un mariage au cœur d’un hôtel de luxe. Ce piège, évidemment très prévisible, insiste sur une histoire inintéressante et superficielle au possible, où les rares enjeux se résument à une série de clichés sur le mariage et l’engagement.
Sans pour autant être détestable, Tom et Jerry dispose d’un trop grand nombre de défauts pour espérer être simplement un bon film. Et pourtant, ce résultat était prévisible, car le long-métrage rentre facilement dans la catégorie des fausses bonnes idées. Le succès de la licence repose essentiellement sur un humour tranchant, efficace et condensé en quelques minutes de pur plaisir cartoonesque.
Le résultat est sans appel : le Tom et Jerry de Tim Story est un exercice raté sur tous les plans. En souhaitant rendre hommage à la création de Hanna et Barbera, le film fait tout l’inverse et oublie son sujet principal pour nous offrir une histoire sans enjeu et sans la moindre envie créative. Bien loin d’être sauvé par sa médiocre animation, le film sombre dans une pauvreté intellectuelle, ne sachant jamais comment exploiter son bestiaire animé. Un point positif ? Le film nous aura au moins donner l’envie de redécouvrir les courts-métrages d’origine. Un mal pour un bien.