Ce qu’on a vu au 7ème Festival du Cinéma Chinois en France

Le week-end du 20 mai 2017 débutait, dans le sud de la France, un festival de cinéma très prestigieux qui en est à sa 70ème édition : Le festival de Cannes ! Et donc pendant ce temps là j’ai passé mon week-end dans le Gaumont Marignan sur les champs Elysées à Paris afin de voir un maximum de films du Festival du Cinéma Chinois en France. Ce festival en est à sa 7ème édition et se déroule du 15 mai au 27 juin à Paris, Lyon, Strasbourg, Marseille, la Réunion et Brest. Il a pour but de présenter un best-of du cinéma chinois actuel avec des films de tous genres (thriller, drame, kung-fu, animation, etc…).

Je vais donc brièvement vous présenter et critiquer les films que j’ai pu voir puis m’attarder sur ceux que je n’ai pas (encore) vu mais qui me semblent tout de même particulièrement intéressants. A noter cependant que si nous vous conseillons quasi-inconditionnellement ces films, certains pourraient ne jamais atteindre un réseau de diffusion plus large et facilement accessible. Ce festival est donc une occasion unique à ne surtout pas manquer !


Chongqing Hot Pot (Thriller / Comédie noire)

« Chongqing aujourd’hui. Trois amis sont copropriétaires d’un restaurant à fondue situé dans l’un des nombreux anciens abris anti-aériens de la ville. La faillite est proche car le restaurant n’a plus de clients. Un acheteur potentiel estime que le restaurant est trop petit. Sans argent pour l’agrandir, les trois amis décident de faire les travaux eux-mêmes. En creusant, ils se retrouvent dans la salle des coffres d’une banque voisine. Déterminés à ne rien voler, ils ne savent comment combler le trou. Ils découvrent rapidement qu’une ancienne camarade d’école, Yu Xiaohui, travaille dans cette banque. Celle-ci leur propose un plan diabolique qui leur permettra non seulement de ne pas laisser de traces de leur passage mais également de dérober l’argent. Le jour décidé pour l’opération, la banque est attaquée par un véritable gang de voleurs qui retient tout le personnel en otage, y compris Yu Xiaohui. »

LE COUP DE CŒUR DE CE FESTIVAL ! On passe du rire aux larmes dans ce thriller décalé et délirant qui n’a rien à envier aux meilleurs films des frères Cohen. Mêlant le film de braquage, la comédie, la romance et l’action, Chonqging Hot Pot multiplie les tons et les styles avec une habilité déconcertante. Un rythme haletant, une réalisation audacieuse, un éclairage sublime et des acteurs charismatiques font de cette ode à la jeunesse chinoise une réussite absolue. L’habile variation des styles se ressent en analysant la structure du film : sa première partie penche vers le drame social en s’attardant sur l’échec de l’entreprise du héros et l’addiction au jeu de l’un d’eux (mais toujours avec humour et dérision), puis vient un acte central comique / burlesque qui se mêle avec une critique acide de l’implantation du capitalisme en Chine et de la disparition des traditions. Enfin, le climax final : une séquence de braquage et une scène d’action tous deux exemplaires dans leur tension et leur intensité. Un beau film, nostalgique et plein d’espoir que je recommande inconditionnellement (et en plus il donne faim).


Call of Heroes (Arts Martiaux)

« En 1910, la Chine est divisée et les seigneurs de la guerre se battent entre eux. Shaolin, le cruel et caractériel fils du seigneur Cao, de passage dans le village de Pucheng, assassine de sang-froid un groupe d’innocents. Arrêté par la milice du village, son chef (Yang) l’incarcère, décide de le faire juger et de l’exécuter. Zhang Yi, colonel de l’armée du seigneur Cao, apprenant la nouvelle, se rend immédiatement à Pucheng, ordonnant la libération immédiate du prisonnier. Zhang rencontre Ma Feng. Les deux hommes se connaissent bien. Ils ont appris les arts martiaux ensemble. Ma a été témoin de la conduite scandaleuse de Shaolin et décide de s’opposer à Zhang. Il est bien déterminé à aider Yang à garder l’assassin sous les barreaux. »

Call of Heroes est un pur film d’arts martiaux à l’ancienne doté d’un excellent scénario. Il met en scène l’opposition entre des idéalistes prêts à faire des sacrifices pour leurs valeurs et des pragmatiques refusant ces sacrifices (conflit très important dans l’histoire de Chine). L’intrigue est également très imprévisible et surprenamment sombre, osant des choses taboues chez les blockbusters Hollywoodiens. On a également droit à un casting de super-stars du cinéma chinois avec Eddie Peng (la Grande Muraille), Louis Koo (Drugs War), Lau Ching-Wan (Running out of Time) et Wu Jing (SPL). Mais le plus important dans un film d’arts martiaux, c’est les scènes d’action : elles sont chorégraphiées et filmées par Sammo Hung, une star de la vieille époque du kung-fu qui a fait ses classes aux cotés de Jackie Chan et qui est un génie de la chorégraphie. On a des scènes de kung-fu classique (Wu Jing livre une incroyable performance en plan séquence), du Wire-fu, du combat comique…

En somme Call of Heroes est un excellent film de kung-fu avec un bon scénario qui ne pèche que par quelques longueurs et des effets spéciaux parfois douteux.


Mr No Problem (Drame / Film d’auteur)

« En 1942, pendant la guerre sino-japonaise, le domaine agricole de Shuhua situé près de Chongqing est dirigé par Ding. Il a été embauché par la famille Xu, propriétaire du domaine avec l’homme d’affaires Tong afin de le faire fructifier. Le domaine n’est pas rentable et Ding, se sentant menacé, feint de redoubler d’efforts. ll est remplacé mais le cours des événements le voit revenir et comme précédemment, le domaine d’apparence prospère, continue de perdre de l’argent. »

Mr No Problem est un film d’auteur en noir et blanc adapté d’une nouvelle de Lao She, un célèbre romancier chinois du XXème siècle. Ce film s’adresse clairement plus aux amateurs de théâtre qu’aux cinéphiles. En effet la division du film en trois actes (comme beaucoup de pièces classiques), la réalisation (chaque scène est un unique plan fixe et généralement les mêmes lieux sont cadrés de la même manière d’une scène à l’autre) et le rythme nous donnent l’impression d’assister à une représentation théâtrale plus qu’à une projection cinématographique. Cependant Mr No Problem reste un beau film (surtout grâce à la splendeur du paysage et de l’architecture chinoise sublimés par le noir et blanc travaillé) qui dresse un portrait fascinant de la bourgeoisie agricole chinoise et de la société mondaine des années 40.


Opération Mékong (Action)

« Le « Triangle d’Or », situé au confluent du Myanmar, du Laos et de la Thaïlande, est connu comme étant l’une des principales zones mondiales de production de stupéfiants. Deux navires marchands chinois descendant le Mékong dans cette région sont arraisonnés par des trafiquants et leurs équipages exécutés. Une quantité considérable de capsules de méthadone est retrouvée sur place. Le gouvernement chinois réagit immédiatement en envoyant un groupe de policiers d’élite spécialisés dans la lutte contre les narcotiques dirigé par le capitaine Gao afin de découvrir la vérité et de démasquer les responsables de ce massacre. Coopérant avec l’agent infiltré Fang, ils vont rapidement découvrir la provenance de cette drogue et tenter de faire tomber le chef du cartel. Les forces chinoises, birmanes, laotiennes et thaïlandaises vont alors s’unir afin de tenter de l’appréhender. Mais Gao et Fang doivent affronter de nombreux obstacles avant de pouvoir mettre définitivement fin au trafic. »

Opération Mékong est un gros film d’action rempli de pétarade mettant en scène la lutte contre la drogue en Asie. Les scènes d’infiltration, de course poursuite et de fusillades s’enchaînent dans cette chasse à l’homme sans pitié qui aborde des sujets complexes comme la thématique des enfants soldats ou la difficile coopération des pays d’Asie orientale. Ces sujets ne sont cependant traités que superficiellement et s’effacent malheureusement derrière une intrigue policière simpliste. Le film est desservi par sa réalisation vulgaire (à l’exception de quelques pointes de style) et ses effets spéciaux pas toujours très convaincants. C’est un film d’action sympathique, survolté et dramatique qui cependant ne semble pas avoir les moyens de ses ambitions

(PS : mention spéciale pour le message de fin particulièrement dissonant et probablement imposé par la République Populaire de Chine en échange de financements publiques)


 Deux autres films ont tout particulièrement attiré mon attention :

  • Journey to The West : The Demons Strike Back est une comédie fantastique réalisée par Tsui Hark qui est un réalisateur de génie ayant (entre autres) révolutionné le cinéma d’arts martiaux avec Il était une fois en Chine, le film de sabres avec The Blade et le cinéma d’action avec Time and Tide. La saga Journey to the West, dont The Demons Strike Back est le deuxième volet, est une adaptation très libre du roman du XVIeme sicècle La Pérégrination vers l’Ouest et jouit d’un univers graphique délirant absolument génial.
  • Big Fish and Bégonia est un film d’animation à gros budget. Il raconte l’histoire onirique du voyage dans notre monde d’une divinité sous la forme d’un grand dauphin. Ce films semble visuellement éblouissant (et de fait, il a nécessité 12 ans de travail) de plus il s’inspire de la poésie chinoise et de la philosophie taoïste pour un résultat qu’on dit magnifique.

Le Festival du Cinéma Chinois en France continue jusqu’au 27 juin selon les modalités suivantes :

  • Paris : au Cinéma Christine 21 jusqu’au 6/06
  • Strasbourg : au Cinéma l’Odysée jusqu’au 20/06
  • Marseille : au Cinéma Le Prado du 7/06 au 11/06
  • Cannes : au Cinéma les Arcades du 6/06 au 17/06
  • Lyon : au Pathé Bellecour du 9/06 au 11/06 et au Cinéma Les Alizés Bron jusqu’au 15/06
  • Brest : au cinéma Les Studios du 14/06 au 27/06
  • La Réunion : au Plaza à St Denis, au Ciné Palmes à St-Marie, au Ritz à St-Denis et au Rex à St-Pierre jusqu’au 6/06

Toutes les informations sont sur le site du Festival.

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